Centre de recherche et d’enseignement
des géosciences de l’environnement
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Outils de l’Unité Radiocarbone

Spectromètre AixMICADAS

 Le spectromètre MICADAS (Mini Carbon Dating System) est une innovation dans le domaine de la spectroscopie de masse par accélérateur du fait de sa tension accélératrice réduite de 200 kilovolts. En effet cette dernière permet de limiter considérablement la taille de l’instrument qui a une empreinte au sol de 2,6 x 3,2 m². AixMICADAS est équipé d’une source d’ions hybride qui permet aussi bien l’analyse d’échantillons de taille classique (≈1 mgC) avec des cibles de graphite que des échantillons de CO2 de très petite taille (< 100 μgC) grâce à la source d’ions à CO2 gazeux (GIS).

La source d’ions d’AixMICADAS est une source dite à pulvérisation (sputtering) car elle utilise un faisceau de césium afin de pulvériser la pastille de graphite contenu dans les cibles. Un réservoir de césium est chauffé (T > 130 °C) afin de produire les vapeurs de césium qui sont ensuite guidées jusqu’à un ioniseur sphérique chauffé à très haute température (> 1000 °C). L’ioniseur permet l’ionisation et la focalisation du faisceau de césium sur la cible. Lors de l’injection de petits échantillons sous forme de CO2, des cibles spéciales sont utilisées. Ces dernières sont percées latéralement pour permettre l’acheminement du CO2 jusqu’au site de pulvérisation à l’intérieur de la cible où un insert de titane permet la production du faisceau d’ions négatifs du carbone. La source d’ions permet l’insertion de 39 échantillons et l’intensité typique des faisceaux en sortie de source est de 60-70 uA pour les cibles graphites et 10-15 uA pour les cibles gaz.

En sortie de source d’ions, les trois isotopes du carbone sont injectés séquentiellement (12C : 30 μs, 13C : 520 μs, 14C : 40 ms) dans la partie accélératrice de l’instrument grâce à un secteur magnétique couplé à un système de pulsation électrostatique ultra rapide. Un collecteur de Faraday en sortie d’aimant permet une mesure de l’intensité du faisceau dans la partie de basse énergie du système.

Les ions négatifs se dirigent ensuite dans la partie accélératrice du spectromètre dans laquelle une cible gazeuse située au centre de la section permet de modifier leur état de charge de une fois négatif à une fois positif afin d’obtenir un faisceau accéléré à 400 keV et dépourvu de la grande majorité des interférences moléculaires du 14C (12CH2, 13CH). L’utilisation de l’hélium comme gaz d’épluchage (stripping) dans la section accélératrice permet de bénéficier d’une excellente transmission du faisceau de près de 50%. La tension accélératrice réduite de l’instrument (194 kV) permet de disposer d’une enceinte accélératrice opérant sous vide et non sous gaz isolant SF6 comme les accélérateurs de plus haute énergie. La maintenance s’en trouve grandement simplifiée.

Après le secteur magnétique en partie haute énergie, des collecteurs de Faraday sont disposés sur la trajectoire des deux isotopes stables de carbone, 12C et 13C, afin d’en mesurer les courants ioniques qui seront utilisés pour les calculs d’âge radiocarbone. Particularité du MICADAS, un troisième collecteur de Faraday, intermédiaire aux deux précédents, effectue une mesure du 13C issu de la fragmentation moléculaire des ions 13CH isobares du 14C. Cette mesure est utilisée pour contrôler et corriger totalement les interférences isobariques résiduelles. 

Un déflecteur électrostatique cylindrique de 90° permet une dernière sélection du faisceau en énergie avant le détecteur d’AixMICADAS en bout de ligne qui compte directement les ions 14C+ de l’échantillon. Le détecteur d’AixMICADAS est une chambre d’ionisation remplie d’un gaz d’isobutane à une pression de 25 mbar. La chambre d’ionisation est séparée du vide de l’accélérateur par une fenêtre de nitrure de silicium de 50 nm d’épaisseur. L’énergie des ions 14C+ est totalement dissipée dans le volume de gaz du détecteur.

 

Source d’ions à CO2 gazeux couplée à AixMICADAS

Les échantillons de radiocarbone de petites tailles (< 100 µg C) sont analysés sous forme de CO2 gazeux avec la source à gaz carbonique. Ce système d’introduction de CO2 (Gas Interface system, GIS, ETH Zürich) est couplé à un analyseur élémentaire (EA), à un système d’hydrolyse des carbonates (CHS) et à un cracker de tubes permettant d’injecter différents types d’échantillons. Le piégeage du CO2 provenant du CHS ou de l’EA est réalisé grâce à un piège à zéolithes. Après chauffage à 450 °C, ce piège libère le CO2 de l’échantillon dans une seringue d’injection. Le CO2 y est ensuite dilué dans un rapport à 95 % d’hélium et 5 % CO2 puis le mélange est injecté progressivement avec moteur pas-à-pas, dans la source d’ions via un tube métallique capillaire.

Un cracker de tubes permet la mesure du 14C d’échantillons piégés sous forme de CO2 purifié et scellé dans des ampoules de verre. Le cracker dispose de 8 cylindres métalliques où sont insérées des ampoules de 5 cm à 8 cm de longueur et de 4 mm de diamètre. Un système pneumatique vient briser l’ampoule afin de libérer le CO2 vers la seringue d’injection du GIS où est effectué le mélange CO2-He qui est ensuite injecté dans la source d’ions d’AixMICADAS.

Un analyseur élémentaire (Vario Micro Cube Elementar Ó) couplé à l’interface gaz (GIS) permet la combustion de micro-échantillons (< 150 mgC) de matière organique, préalablement enveloppés dans de petites nacelles en argent. Après synthèse et quantification chromatographique, le CO2 produit est piégé sur les zéolithes du GIS, puis libéré par chauffage à 450°C, introduit et mélangé à l’hélium dans la seringue d’injection reliée de la source d’ions à CO2 gazeux d’AixMICADAS.

Le système d’hydrolyse des carbonates CHS1 (Carbonate Handling System) est un dispositif qui permet l’acidification (hydrolyse partielle séquentielle ou complète) de 42 échantillons dans des piluliers thermostatés (40°C). Le prélèvement du CO2 produit par l’hydrolyse s’effectue à l’aide d’une aiguille à double entrée qui balaie le pilulier avec un flux d’hélium (70 ml/min) et qui transfère le mélange gazeux issu de l’hydrolyse dans un piège à eau puis dans le piège à zéolithes du GIS qui collecte le CO2 avant son injection dans la source d’ions.

 

Système de graphitisation AGE3

L’unité du radiocarbone est équipée d’un système de graphitisation (AGE3) pour préparer les cibles de graphite à analyser avec la source solide d’AixMICADAS. Ce système est couplé à un analyseur élémentaire (Vario Micro Cube Elementar Ó) et au système d’hydrolyse de carbonate (CHS2) pour produire des échantillons de graphite à partir de matières organiques ou inorganiques. Le CO2 issu des deux systèmes est piégé sur des zéolithe puis injecté dans un des réacteurs par chauffage du piège à 420°C. Le graphite est ensuite produit à 580 °C par réduction du CO2 par l’hydrogène en présence de fer comme catalyseur de la réaction de Bosch: CO2 + 2 H2 → C + 2 H2O

Pour conduire à une réaction complète, l’eau produite par la réaction est condensée dans un système de doigt froid refroidi par effet Peltier. Le système de graphitisation automatisée permet la réduction simultanée de 7 échantillons en 3 heures.

  • Analyseur élémentaire

Un analyseur élémentaire (Vario Micro Cube Elementar Ó) permet la combustion des échantillons de matière organique (collagène, bois, sols, aérosols…) préalablement enveloppés dans de petites nacelles en aluminium ou en étain. L’échantillon est brûlé et oxydé dans une colonne de combustion chauffée à 950°C sous un flux d’Hélium. Les gaz de combustion (SOx, NOx, H2O, O2 et CO2) sont transférés par un flux d’hélium à travers une colonne de réduction remplie de fils de cuivre chauffée à une température de 550º C, ce qui permet de réduire les oxydes d’azote en N2 tandis que le soufre et les halogènes sont éliminés par de la laine d’argent. L’eau est ensuite piégée dans un tube de pentaoxyde de phosphore puis les gaz résiduels N2 et CO2 sont séparés par une colonne chromatographique couplée à un détecteur de conductivité thermique (TCD). Le diazote est élué en premier puis un système de vanne transfert le CO2 vers la trappe zéolite du système de graphitisation.

  • Automate d’hydrolyse des carbonates CHS2

Le CHS2 est une évolution du système CHS1 qui pousse encore plus loin l’automatisation des processus d’analyse des carbonates. L’appareil dispose de 64 positions pour des piluliers de 4,5ml. Il permet d’automatiser complétement les procédures de flush, de leaching, d’hydrolyse et de mesure des échantillons. Le CHS2 peut basculer de manière autonome entre deux différents acides (leaching ou hydrolyse totale) ou de seringue (flush ou prélèvement du CO2) suivant la séquence programmée par l’utilisateur. Le CHS2 peut servir à la fois pour l’analyse de microéchantillons de carbonate lorsqu’il est couplé au GIS d’AixMICADAS ou à la production de cibles de graphite lorsqu’il est couplé au système de graphitisation AGE3.

  • Presse pneumatique des cibles de graphite

Le mélange graphite-fer est ensuite pressé dans un cylindre en aluminium à l’aide d’une presse pneumatique qui produit une surface optimale pour l’ionisation par pulvérisation d’ions Cs+ dans la source d’ions d’AixMICADAS.

Ligne cryogénique de combustion, purification et graphitisation

Cette ligne cryogénique, prototype réalisé en inox, permet la préparation de petits échantillons de CO2 (<100 µgC) préalablement aux mesures sur le cracker de la source à gaz d’AixMICADAS.  Les échantillons organiques telles que des fractions moléculaires séparées par chromatographie sont placés dans un tube en quartz en présence de CuO (source d’oxygène pour la combustion) et de laine d’argent pour éliminer les éléments tels que le soufre et les composés halogénés. Le tube est ensuite évacué sur la ligne à vide pour éliminer le CO2 atmosphérique, scellé à l’aide d’un chalumeau. Le tube est transféré dans un four à moufles à environ 850°C pendant quelques heures pour entraîner l’oxydation de la matière organique par le CuO. Le tube est ensuite replacé sur la ligne préalablement évacuée et cassé dans un cracker de tube manuel. L’eau produite lors de la combustion est éliminée dans un piège cryogénique (environ -50°C) puis le CO2 est piégé sur un second piège (azote liquide) tandis que les gaz non condensables sont évacués. Le CO2 préalablement quantifié dans un volume calibré est ensuite transféré et scellé dans un tube en verre adapté au cracker de la source à gaz. Cette ligne cryogénique a aussi été optimisée pour préparer des cibles de graphite à partir d’échantillons organiques de taille standard (≈ 1 mgC). Cette ligne polyvalente peut être modifiée et complétée pour d’autres applications.

Ligne de séparation des fractions EC-OC

Ce prototype est constitué d’un analyseur (Sunset Laboratory Inc) qui permet la séparation et la quantification des fractions de carbone organique et de carbone élémentaire des particules fines collectées sur des filtres atmosphériques ou d’autres échantillons. L’analyseur est couplé à une ligne cryogénique destinée à la séparation et au piégeage des différentes fractions de CO2 qui sont ensuite scellées en ampoules destinées à la mesure du 14C grâce au cracker de tube de l’interface de la source d’ions à CO2 gazeux d’AixMICADAS.

Microscope échantillonneur

Le MicroMill (Elemental Scientific) est un microscope couplé à une micro-perceuse pilotée par ordinateur. Le MicroMill permet d’échantillonner à très haute résolution (quelques dizaines de µm) des archives carbonatées telles que les coraux, les algues corallines, les mollusques ou les spéléothèmes.

Laboratoire de prétraitement des échantillons

Un échantillonnage minutieux et un prétraitement des échantillons sont des étapes cruciales dans le processus de préparation des échantillons préalablement aux mesures du radiocarbone. En effet, il est essentiel d’éliminer complétement le carbone exogène (carbone d’un âge différent de l’échantillon à dater) afin de ne pas compromettre la justesse de la mesure.

Les méthodes de prétraitement sont adaptées suivant la nature des échantillons et des contaminants mais généralement les échantillons subissent un traitement physique à l’aide par exemple d’un scalpel ou d’une fraiseuse portative (Dremel) pour éliminer les contaminants visibles ou les couches extérieures des objets à dater puis les échantillons sont réduits en taille (broyage, concassage ou découpage) afin d’augmenter la surface de contact avant l’étape de prétraitement chimique. Les échantillons sont préalablement pesés à l’aide d’une balance ou microbalance afin de déterminer les rendements d’extraction.

Les méthodes de prétraitement chimique courantes impliquent une hydrolyse des échantillons de carbonates afin de perdre environ 30 à 50 % de la masse initiale. Ce nettoyage de surface a pour objectif d’éliminer la fraction carbonée (issue de processus diagenétique comme par exemple la recristallisation de l’aragonite en calcite ou des dépôts de carbonates secondaires) afin de ne laisser subsister que le carbonate primaire pour la datation. Les échantillons de matière organique (par ex. bois et charbons) sont l’objet de traitements séquentiels acide-​base-acide destinés à purifier le carbone originel. Les échantillons organiques sont ensuite séchés au lyophilisateur ou à l’étuve, pesés puis graphitisés ou bien analysés en ligne à partir de la source à gaz carbonique.